L’occupation prolongée par Israël du territoire palestinien est illégale

L’UE devrait utiliser le 50e anniversaire de l’occupation pour procéder à une évaluation complète de ses relations avec Israël et les entités israéliennes

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Introduction

L'UE devrait utiliser le 50e anniversaire de l'occupation pour procéder à une évaluation complète de ses relations avec Israël et les entités israéliennes.

A l’approche du 50e anniversaire de son occupation du territoire palestinien, Israël a considérablement accéléré ses activités de construction de colonies. La communauté internationale, pendant ce temps, reste largement muette alors que les actions israéliennes érodent la base territoriale d'une solution à deux Etats.

Bien que ce soit en grande partie un problème politique, des facteurs juridiques sont également en jeu, selon un nouveau rapport du Conseil Européen pour les Relations Internationales (ECFR). Pendant trop longtemps, les gouvernements ont concentré leur attention sur le droit de l'occupation, ce qui permet à la puissance occupante d’avoir recours à la force et de limiter les droits de la population locale lorsqu'il est militairement justifié de le faire. Dans ce cadre, Israël échappe à toute nécessité de rendre des comptes puisqu’il est fondé sur l'hypothèse que l'occupation est temporaire et qu'Israël envisage de restituer ultérieurement le contrôle de ce territoire au peuple palestinien souverain et légitime.

Mais, Israël n'a pas de telles intentions. Ce rapport de l’ECFR intitulé L'occupation illégalement prolongée d’Israël : quelles conséquences dans un cadre juridique intégré fait valoir que la présence d'Israël sur le territoire palestinien ne dénote pas une situation d'occupation justifiée par une nécessité militaire, mais par une annexion du territoire. Cela ressort clairement de ses décisions de transférer sa propre population civile dans les territoires (souvent simultanément à l’expulsion forcée des Palestiniens locaux) et d'étendre sa juridiction interne au territoire palestinien. Compte tenu de ces objectifs, la présence continue d'Israël sur le territoire palestinien est illégale.

S'attaquer à cela nécessite l'application diligente d'un cadre juridique international intégré qui comprend le droit international du recours à la force et le droit à l'autodétermination des peuples. Dans un tel cadre, les pratiques israéliennes suivantes sont incontestablement illégales :

  • Le recours à la force pour acquérir le territoire palestinien (utilisé pour maintenir son contrôle sur le territoire) ;
  • L'établissement d'un système de discrimination raciale dans le territoire occupé par le transfert illégal de sa population civile (en appliquant les lois nationales israéliennes aux colons israéliens et les lois militaires aux Palestiniens) ;
  • Le déni flagrant du droit internationalement reconnu à l'autodétermination du peuple palestinien à l'indépendance sur le territoire, en tentant de transformer le statut du territoire et son caractère démographique (par exemple en réduisant la population palestinienne de Cisjordanie et de Gaza d’au moins 600 000 personnes).

Cela a des implications importantes pour les États tiers et les acteurs internationaux, qui ont l’obligation de mettre fin à ces actes illégaux. Au minimum, ils doivent, en vertu du droit international, refuser de reconnaître ces actes (ainsi que les droits et avantages qu'ils génèrent) comme licites dans le cadre de leurs relations avec Israël.

Cette obligation est particulièrement critique pour l'Union européenne (UE) et ses États membres, qui ont d’importantes relations interétatiques et des échanges commerciaux avec Israël et dont l'ordre juridique est fondé sur le respect du droit international.

Alors que l'Europe a adopté des positions fermes en vertu de la Charte des Nations Unies sur le caractère et les conséquences juridiques de l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014, elle n'a pas encore pleinement respecté ses obligations de non-reconnaissance en ce qui concerne les actes illégaux d'Israël. En omettant de le faire, l'UE et ses États membres permettent effectivement que leurs relations avec Israël compromettent l'intégrité de leurs ordres juridiques internes.

L'UE a pris un certain nombre de mesures pour différencier l'Etat d'Israël de ses colonies illégales. En 2012, le Conseil des affaires étrangères de l'UE a affirmé que tous les accords avec Israël doivent indiquer sans équivoque et explicitement leur inapplicabilité aux territoires occupés depuis 1967. Et en 2013, la Commission européenne a publié un ensemble de lignes directrices qui définissent les paramètres de la participation d'Israël aux programmes de l'UE tels que Horizon2020, et interdisent le financement d'entités israéliennes opérant dans les colonies. Ce ne sont que quelques-unes des mesures correctives de l'UE conduites par une nécessité juridique et destinées à assurer la non-reconnaissance ; de nombreuses autres sont en cours.

Mais l'UE doit agir bien plus diligemment pour mettre en œuvre ces positions. L'UE et ses États membres n'ont pas encore élaboré une politique et un processus cohérents pour détecter et corriger de manière proactive ses relations avec les entités israéliennes qui donnent effet à ses actes illicites. Et, tandis que que quelque 18 États membres ont émis des avis alertant les entreprises basées dans l'UE sur les risques liés aux activités liées aux colonies, ces derniers doivent encore être associés aux mesures de conformité nationales appropriées pour informer les autorités réglementaires nationales, notamment les autorités publiques et les ressortissants.

Au lieu de cela, la révision des relations UE-Israël pour assurer la non-reconnaissance a été fragmentée et comprend de nombreux cas où la mise en œuvre du droit de l'UE demeure insuffisante. Pour garantir la cohérence et la transparence de ces processus, l'UE devrait profiter du 50e anniversaire de l'occupation pour procéder à une évaluation complète de ses relations avec Israël et les entités israéliennes, conformément à l'impératif de non-reconnaissance, basée sur la nécessité d'assurer la mise en œuvre pleine et effective du droit de l'UE et son engagement profond à respecter le droit international.

L'ECFR ne prend pas de position collective. Les publications de l'ECFR ne représentent que les opinions de leurs auteurs.